Batman Cataclysme

Batman Cataclysme est ce que l’on appelle un « event » dans le jargon des comics américains : il s’agit d’un évènement qui se produit in universe, et qui a de nombreuses répercussions éditoriales, en particulier :

  • Dans l’espace : de nombreuses publications sont impactée et traiteront de prés ou de loin le sujet ;
  • Dans le temps : les conséquences et implications de l’event se font sentir au fils des mois qui suivent…

Comme pour le verrez ci-dessous, Cataclysme coche largement les deux cases. Cet évènement est repris dans de nombreuses issues différentes (celles évidemment dédiées à Batman, mais également Robin, Nightwing, Huntress ou encore Azrael…). Et il constitue en fait un gigantesque prologue à la saga No Man’s Land, que j’aborderai dans des articles ultérieurs.

Synopsis

Un tremblement de terre inouï dévaste Gotham City. Les victimes sont innombrables, la majorité des immeubles sont partiellement écroulés, les réseaux d’énergies et de communications ne fonctionnent plus, les routes sont impraticables…

Dans cette dévastation sans précédent, actions et réactions des personnages bien connus de Gotham (justiciers comme vilains) oscilleront entre actions heroiques et choix cornéliens… Car dans une telle situation de crise, les lignes entre Bien et Mal sont brouillées comme jamais.

Lorsque j’ai ouvert cet album, je savais que j’avais entre les mains un grand classique du Chevalier Noir (dont les publications originales datent – mine de rien – de 1998). Traitant du légendaire tremblement de terre de Gotham qui marqua durablement l’univers de Batman et qui est régulièrement évoqué dans les publications de DC Comics, je fondais quelques espoirs dans le fait de tenir un bon album, en dépit de sa hideuses couverture, sur laquelle Batman semble avoir un cou de girafe adulte.

Et malgré mes attentes, quelle claque ce fût !

Une catastrophe organique

Le postulat de départ est assez génial : placer les personnage principaux de la Bat-family (en particulier : Batman, Robin, Nightwing, Oracle) dans une situation inédite, puis proposer leurs réactions face à ce nouveau paradigme. Et si j’ai trouvé qu’il manquait peut-être un ou deux chapitres de préambule afin de poser les personnages et situations « normales » avant le cataclysme, force est de constater que l’introduction de ce séisme et son traitement son magistralement réussis. Car s’il aurait été facile de poser ainsi un cadre post-apocalyptique servant de décors vaguement original à des péripéties sans originalité, les scénariste parviennent à faire du tremblement de terre… un personnage à part entière !

Ainsi, nos protagonistes principaux doivent composer avec un cataclysme organique, ayant des impacts réels et directs :

  • Rupture des réseaux d’énergie et de communication ;
  • Nombreux décès ;
  • Constitutions de bandes de pillards ;
  • Innombrables blessés, tandis qu’aucune structure de secours n’est en place;
  • Ressources habituelles inutilisables (appareils, gadgets, matériel, passages secrets…) ;
  • Limites humaines (accumulation de fatigue physique et mentale) ;
  • Risque de dévoilement des identités secrètes (la batcave est éventrée et désormais à ciel ouvert)
  • Aggravation des dégâts, causée par des fuites de gaz ou des incendies incontrôlés ;
  • Profiteurs en tous genres : organisation de trafics, menaces d’armes sismiques…

En savoir plus…

Sachez que lors de la conception de la saga No man’s land dont Cataclysme est le prologue, l’éditeur américain DC Comics travailla sur la première carte officiel de la ville de Gotham City.

L’intérêt était bien sûr de disposer d’un support commun aux nombreux auteurs pour situer géographiquement leurs histoires (en clair : construire une ville pour mieux comprendre ce qu’il fallait (y) détruire).

Heureusement pour nos héros encapés (ou pas), ils sont rapidement épaulés par de nombreux personnages secondaires, tels qu’Azrael, Catwoman, Huntress, Spoiler pour ne citer que les justiciers masqués. Car l’on retrouve aussi divers membres du GCPD1 tels que Harvey Bulock, Renée Montoya, l’inspecteur Hawke ou bien sûr le commissaire Gordon.

La liste ci-dessus n’est pas exhaustive, mais Cataclysme fait également la part belle à de nombreux anonymes sur lesquels nous nous attardons plus ou moins longtemps, et qui disposent de leurs propres arcs narratifs, dans l’héroïsme ou la lâcheté, tantôt avec une fin heureuse, tantôt avec une fin déchirante…

La grande originalité de Cataclysme, surtout dans un univers superhéroique, c’est de ne pas présenter une menace tangible, un grand méchant surpuissant ou un nouveau fou-furieux. Ici, c’est une force de la nature qui se manifeste, qui rappelle à tout-un-chacun que l’on ne peut pas toujours tout contrôler et que parfois on ne peux pas faire plus que de son mieux même si cela sera dramatiquement insuffisant. Ce fatalisme ponctue l’ensemble de l’album, décliné à l’infini suivant les personnages et les péripéties qu’ils rencontrent.

Toutefois, les méchants ne sont jamais vraiment trés loin. Et l’on croisera tout de même quelques figures connues telles que Bane, Poison Ivy2, le mystérieux Maitre-Secousses ou encore les patients d’Arkham 3.

Panorama d’une cité dévastée

Du fait du trés (trés (TRES)) grand nombre de dessinateurs qui interviennent dans cet album, les dessins sont trés variables. Et je ne saurais faire une analyse issue par issue. Globalement, les dessins sont trés bons (la couverture de l’album n’est donc décidément pas indicative de quoi que ce soit). Assez typés des années 90’s, on retrouvera des silhouettes aux proportions presque divines (mais jamais vulgaires) ainsi que des couleurs souvent vives avec assez peu de jeux d’ombres ou de hachures.

Un seisme de magnitude 7,6 sur l’échelle de Richter4 est une occasion en or données aux illustrateurs de proposer des compositions dantesques. Et rassurons-nous : ils s’en sont saisie ! Les pages et double-pages de destructions se multiplient (en particulier dans la première moitié de l’ouvrage) avec des compositions qui coupent régulièrement le souffle, dans lesquelles la gravité semble suspendues en une immobilité pourtant douloureusement réaliste. Ces multiples scènes de destructions sont rendues narrativement possibles sans être redondantes grâce à la multiplicité des points de vues offerte par la publication de l’event en différents fascicules, chacun centré sur un protagoniste différent (voyez ci-dessous).

Les dessins sont tantôt plutôt réalistes (du moins compte tenu de ce qui se faisait dans les années 90) et tantôt trés stylisés, presque cartoonesques, faisant penser aux graphismes de Un long Haloween. Néanmoins, l’ambiance générale de l’album est violente, trash et sans conscession ; à ne clairement pas laisser entre les mains les plus jeunes.

Carte de lecture

Comme je l’évoquais en introduction, Cataclysme est un event impliquant diverses publications initialement disparates lors de leurs éditions initiales aux USA. Ainsi, cet album rassemble donc des fascicules différents afin de reconstituer une histoire complète. Et à ce titre, il y parvient parfaitement, associant un titre de chapitre à chaque issue initiale ; aussi, saluons encore le trés bon travail d’édition des français de chez Urban Comics. Néanmoins, il convient au lecteur francophone de garder en mémoire la nature d’origine de ce qu’il lit. Plutôt que d’appréhender l’album comme une histoire continue d’une page à l’autre, il faut plutôt voir chaque chapitre comme une pièce d’un puzzle qui se reconstitue petit à petit, au fil de la lecture.

Néanmoins, je ne peux pas ignorer le casse-tête que cela doit être lorsque l’on est un fan de comics chez l’Oncle Sam… Pour illustrer cela (et pour mon plaisir), j’ai réalisé une carte des différents issues compilés dans l’album. Les couleurs symbolisent les personnages principaux, les numéros entre parenthèses sont les chapitre (i.e. l’ordre de lecture).

Voyez ci-contre…

Nota bene

Le diagramme ci-dessus n’est pas un diagramme de dépendance. En effet, il s’agissait d’un exercice que j’avais envie de réaliser en tant que lecteur ; mais il n’est absolument pas nécessaire de le consulter pour lire l’album.

Je verrai en temps voulu, mais il est probable que je m’amuse à compléter cette cartographie avec l’ensemble des issues qui constituent la saga No man’s land…!

Conclusion

Vous l’aurez compris, c’est avec un immense plaisir que j’ai lu Cataclysme, et je ne peux que vous le recommander ! Une ambiance d’inéluctabilité proposant un équilibre précaire entre espoir et désespoir, héroïsme dans l’adversité et pessimisme tragique, L’ensemble est servi par des personnages crédibles contraints à la survie et au surpassement, des dessins parfois somptueux, et un scénario simple mais efficace.

Vivement la suite, dans les six (!) tomes de No man’s land.

  1. Police de Gotham City.[]
  2. Dans, peut-être, le plus mauvais chapitre.[]
  3. Dans un chapitre un peu à part, qui leur est spécialement dédié.[]
  4. Echelle couramment utilisée à la fin du dernier millénaire mais obsolète dans les sciences de la terre des année 2020.[]

Notes

Scenario : 8 / 10
Dessin : 7 / 10
Ambiance : 10 / 10
Note moyenne : 8.3 / 10

En savoir plus sur l'album...

Album : Cataclysme

Type de BD :

Editeur :

Collection :

Parution : mars 2014

Lien : Site officiel

Taille : 409 pages

Contenu : Batman : #553 à #554 Detective Comics : #719 à #721 Shadow of the Bat : #73 à #74 Nightwing : #19 à #20 Azrael #40 Catwoman : #56 à #57 Robin : #52 à #53 Batman Chronicles #12 Blackgate:Isle of Men #1 Huntress-Spoiler:Blunt Trauma #1 Batman Arkham Asylum:Tales of Madness #1

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