Paul et Bohémont viennent de se crasher au milieu de montagnes désertes, entourées d’une forêt touffue. Ce dernier est gravement blessé, mais ils n’ont que peu de temps avant que l’armada qui a descendu leur aéronef ne leur tombe dessus. Ils sont rapidement rejoints par Oyun, mais dans leur fuite, le fier chevalier est fait prisonnier.
Désormais, la défense de Newtown repose sur Shandi et Paul, qui l’organisent avec leurs moyens, tandis que Bohémond fait bien malgré lui la connaissance de leurs mystérieux et puissants adversaires venus du désert.
Ce deuxième tome de Bomb X peine à maintenir l’élan narratif du premier. Bien que l’histoire reprenne directement après les événements du tome précédent, le récit avance avec difficulté donnant une impression d’enlisement. Certaines idées, comme l’introduction d’une seconde société d’exilés (vivants dans le désert) ou l’utilisation d’une plante alien aux pouvoirs psychotropes et hypnotiques, manquent de profondeur et s’apparentent parfois à des artifices scénaristiques. La mission de secours de fin d’album, trop rapide et simpliste, illustre également une écriture qui manque un peu d’ambition.
Par ailleurs, Paul, que l’on aurait imaginé rester au cœur du récit, glisse progressivement vers le rôle de simple narrateur, tandis que Bohémond prend une ampleur disproportionnée (lui donnant presque une dimension de héros mythologique ou de superhéros, en particulier dans une double-page en fin d’album). Ce glissement renforce une certaine confusion autour de l’identité du protagoniste principal : qui est finalement le héros de cette série ? Et même si ce flou pourrait être volontaire, le résultat est plus frustrant qu’intrigant.
Visuellement, ce tome est une réussite. Le charadesign des antagonistes, bien qu’un peu stéréotypé avec leurs masques mystérieux, ajoute une certaine aura inquiétante. On peut toutefois regretter que cette caractérisation visuelle ne soit pas mieux exploitée dans l’intrigue ; simple charadesign facile, ou réelle utilité des masques encore à découvrir ? Les compositions audacieuses, notamment plusieurs doubles pages et leur découpage inventif, apportent une véritable plus-value ; l’ordre de lecture, parfois déroutant, demande un effort d’adaptation mais contribue à l’immersion.
Dans cet album nous sont en effet proposées plusieurs compositions très (trop?) audacieuses, s’étendant partiellement sur plusieurs pages, et dont le sens de lecture n’est pas toujours des plus simples. Un petit schéma valant mieux qu’un long discours, voici deux exemples…
Dans les 2 planches ci-dessus, les deux tiers du haut de la double page constituent un seul strip à lire en continu de droite à gauche (violet). Puis, le strip du bas de la première page (bleu) se lit avant le strip du bas de la seconde page (jaune).
Second exemple :
Nous avons ici une composition similaire à l’exemple précédent, mais lisible différemment. Bien que le strip du haut soit à cheval sur les deux pages (bleu), chacune des deux pages se lit bien l’une (bleu+vert) après l’autre (bleu+violet).
Sans être vraiment gênant, ce découpage un peu anarchique rappelle les comics. L’on pourra tout de même regretter la nécessité d’appliquer deux logiques de lecture différentes pour une même organisation des pages.
L’univers post-apocalyptique de Bomb X reste une force majeure de la série. Entre des références subtiles à la pop/geek culture et une atmosphère empruntant à Mad Max, l’ambiance générale est bien dosée et immersive. Cette tonalité, accompagnée d’un bestiaire (faune et flore) fantastique intrigant et croissant en importance, compense partiellement les faiblesses du scénario. Cependant, on déplore que les orages temporels, un élément phare du premier tome et sujet à de nombreuses hypothèses, soient ici laissés de côté, privant l’histoire de l’une de ses dimensions les plus intrigantes.
Malgré un dessin et une ambiance convaincants, ce deuxième tome de Bomb X souffre d’un scénario qui s’essouffle et peine à captiver autant que le premier. Les promesses narratives du tome 1 sont ici éclipsées par des choix d’écriture discutables, mais les amateurs de mondes post-apocalyptiques y trouveront encore quelques satisfactions. Un album mitigé, mais dont les qualités visuelles méritent d’être saluées, et qui maintiens de belles promesses pour le (les?) tomes à suivre.
