Posons clairement les choses dés le départ : Imbattable est avant tout une BD concept !
Suivant le super-héros franchouillard éponyme, l’album (ici, le second) nous dépeint toutes sortes d’aventures de longueur variant d’une page à une bonne dizaine 1. Celles-ci mettent systématiquement à l’honneur le super-pouvoir d’Imbattable : celui de se déplacer géographiquement d’une vignette de BD à une autre, au sein d’une page (ou d’une double page) ; notez qu’il peut également faire voyager des objets ou des personnages de la même manière. Vous l’aurez compris, nous sommes donc en présence d’historiette humoristiques absurdes par nature.
Et puisqu’un petit dessin vaut mieux qu’un long discours, voyez plutôt :
Brisant ainsi de 4eme mur du 9eme art, Imbattable sauve la veuve et l’orphelin, combat des savants fous, mais assiste également à la kermesse de son neveu tout en contenant une invasion extra-terrestre. Et si le concept de jouer avec les cases pourrait rapidement tourner en rond, l’auteur (scénariste et dessinateur) multiplie les variantes autour de cette idée, aboutissant à des histoires qui parviennent à se renouveler et à surprendre.
Ajoutons à cela que d’autres personnages nous sont présentés, ayant eux aussi des super-pouvoirs liés au média de la BD. En particulier :
- Le Plaisantin : un supervilain capable de se déplacer entre les deux faces d’une même feuille (tout en respectant sa position de départ et d’arrivée dans la page) ;
- Le Savant fou : autre supervilain dont les inventions ont parfois un impact sur la nature de la page elle-même (composition…)
- Toudi : jeune superhéros disposant de la capacité d’annuler la perspective ;
- Pépé Cochonnet : Grand-père placide pouvant rendre tangible les bulles de BD (phylactères) lorsqu’il est en colère.
De cette façon, Jousselin dispose de quoi renouveler ses jeux conceptuels avec les codes de la BD (et notez que je n’ai pas cité tout le monde ci-dessus). Dans une ambiance humoristique franchouillarde (toutefois loin d’être hilarante), il parodie les superhéros avec un surréaliste totalement assumé en revenant à la nature même de la Bande Dessinée. Celle-ci est, par nature, du temps séquencé (la succession de vignettes) décomposé dans de l’espace (la page de papier). En se déplaçant dans l’espace de la page, Imbattable voyage ainsi dans le temps (passé ou futur) ce qui rend son adaptation impossible dans tout autre média que la BD ! Une volonté portée et assumée par son auteur.
Servi par un dessin simple à la ligne claire, grand classique de chez Dupuis, Imbattable s’apprécie au second degré, comme un jeu entre l’auteur et le lecteur autour des possbilités offertes par la Bande Dessinée. Un petit coup de cœur inattendu !
- L’un des longs récits de l’album, se déroulant en Amérique, est malheureusement le moins intéressant à mon sens.[↑]