Dans une ambiance toujours post-apocalyptique, la ville de Gotham est désormais totalement à l’abandon. Pourtant, nombreux sont les citoyens qui ont souhaité rester sur place. Ainsi, la fière cité se retrouve découpée en de nombreux quartiers, contrôlés par différents gangs, super-vilains, forces de police, mais également Batman et ses alliés.
Tandis que le territoire de ces deux derniers tend à croître, ce second tome de No Man’s Land nous propose surtout une mosaïque d’histoires courtes mettant à l’honneur des points de vue très différents, de Batman lui-même au dernier des mendiants affamés…
Ce deuxième tome de No Man’s Land joue la carte de la narration éclatée, multipliant les points de vue pour offrir une vision globale de Gotham plongée dans le chaos aprés le Cataclysme. Ainsi, chaque chapitre (issue) est titré et nommé, bien que certains soient en deux parties. L’album s’inscrit ainsi en faux, si on le compare au tome précédent qui proposait plutôt 4 arcs scénaristiques successifs.
L’on retrouve ainsi une citée fragmentées en quartiers aux frontières totalement instables (contrôlé par Batgirl, Double-face, le pingouin ou Gordon…), mais également menacée par des forces extérieurs (telles que Locus ou Kobra…) qui voient dans cette zone de non-droit un nouveau terrain de conquêtes ou d’expérimentations. L’idée d’alterner entre des personnages iconiques comme Batman ou Double-Face, et des protagonistes plus modestes (tel qu’Alfred ou Oracle), parfois anonymes, est louable. Certains récits s’avèrent marquants, notamment celui qui détaille les affrontements pour le contrôle des quartiers de Gotham, appuyés par une cartographie qui clarifie les forces en présence. Cependant, cette structure fragmentée ne tient pas toujours ses promesses. Certaines histoires manquent de consistance (telles celle impliquant Cain1, ou les Justice League et autre Young Justice, très dispensables), avec des conclusions qui laissent un goût d’inachevé, qu’elles soient dramatiques ou plus légères.
Visuellement, ce tome reste dans une zone de confort. Le dessin accomplit sa tâche en retranscrivant la désolation de Gotham, mais sans marquer les esprits. On attendait plus d’audace pour souligner l’urgence et le chaos d’une ville morcelée en fiefs rivaux. Là où une approche plus viscérale aurait pu renforcer l’immersion, le style graphique se contente de l’efficacité, avec une très forte patte des années 90, sans prise de risque notable.
Là où ce volume brille, c’est dans son atmosphère. Gotham devient un véritable personnage à part entière, déchirée entre les gangs, les super-vilains et les forces de Gordon. Les rivalités territoriales donnent lieu à des tensions palpables, renforçant le sentiment de survie au cœur de ce No Man’s Land. La carte de la ville, rappelée en cours d’album, sert de point d’ancrage pour comprendre la dynamique entre les différentes factions. Cette représentation géographique apporte une cohérence bienvenue à un ensemble assez hétérogène.
… Au lendemain du cataclysme qui jeta à terre les fiers buildings de Gotham City, la nation américaine abandonna le peuple de la cité réduite en cendres. Seuls survivront les braves, les calculateurs et les fous dans cet enfer sur Terre appelé NO MAN’S LAND.
Ce second tome de No Man’s Land est une œuvre contrastée, où l’ambiance réussit à compenser en partie les faiblesses de scénarii inégaux et morcelés. Si le potentiel narratif est là, il ne parvient pas toujours à s’exprimer pleinement, faisant de ce volume une étape intéressante mais non essentielle pour les lecteurs occasionnels. Notons toute de même une réflexion intéressante (même si trop simpliste) sur la tendance naturelle des Hommes à se regrouper spontanément en bandes plus ou moins sauvages, en cas de situation de crise, malgré l’espoir que peut apporter par exemple un symbole (comme Superman, ici).
- Sauf erreur, il s’agit de l’introduction de la muette Cassandra Cain, qui deviendra Orphean dans la série Batman Detective Comics.[↑]
